Saleté de temps
- Par Liliane Schraûwen
- Le 16/01/2012
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- Dans Le temps qui passe
Saleté de temps, et ce n'est pas de la météo que je parle. Celle-ci d'ailleurs est plutôt clémente. Hiver très doux jusqu'aujourd'hui. Le réchauffement climatique, sans nul doute… Je ne suis pas vraiment très branchée écolo, alors je l'avoue : cela me convient assez. Pas de neige, pas de gel, pas de verglas sur les routes. Pas besoin de chauffer à outrance. Le petit être frileux que je suis a tendance à se réjouir, même si la banquise tend à fondre et si notre plat pays un jour risque de se trouver submergé. Oui, je sais: ce point de vue est loin d'être politiquement correct. Je devrais me préoccuper davantage du sort de mes petits-enfants et de leurs descendants qui risquent de se trouver engloutis par quelque tsunami. S'ils ne meurent pas avant, le cerveau rongé de tumeurs étranges nées de la profusion d'ondes qui les baignent dès avant leur naissance. C'est mon médecin qui l'affirme: le nombre de tumeurs au cerveau est en constante augmentation. Il n'y a aucun doute pour lui sur l'origine de cette sinistre épidémie: GSM, Ipad ou Ipod, MP3 et autres Smartphones sont les coupables désignés. Sans doute a-t-il raison, et cela me préoccupe bien plus que le réchauffement de notre petite planète.
Toujours est-il que le temps auquel je fais ici allusion n'a rien de météorologique. C'est du temps qui passe que je peux parler, ou plutôt du temps passé. Et de celui qui reste, de plus en plus court. De plus en plus vide aussi. Car me voici depuis quelques jours "à la retraite" – l'affreux terme – malgré tous mes efforts pour continuer à pratiquer ce métier que j'adore. Mais l'homme est un animal bureaucratique, et "de wet is de wet", ce qui peut se traduire approximativement par l'adage bien connu selon lequel dura lex sed lex. Vous comprenez ça, vous? On nous bassine dans les médias à propos des mesures gouvernementales (puisque nous avons un gouvernement, qui l'eût cru?) visant à prolonger le temps de travail, notre joli pays manque cruellement d'enseignants mais, quand il s'en trouve un qui n'est pas trop décati, qui aime follement son boulot et qui rêve de le poursuivre, eh bien, non. À la trappe les vieux, ou "dans la trappe" comme le disait déjà ce cher Ubu. Devenus inaptes et incapables du jour au lendemain. Même pas quelques heures/semaine, même pas un tout petit morceau d'horaire réduit, monsieur le chef? Après tout je ne demande pas grand-chose, juste de conserver mon cours de français et de philo en H2, pas plus. Je renonce volontiers à tout le reste, à la technique de la langue en Haute École, à la grammaire, à l'orthographe, à la Méthode de Travail, à l'encadrement du TFE, à la classe de H1… Mais non, pas question. Dehors, les vieux débris, au rebut. À la casse.